Ma chérie, J’ai encore tardé à t’écrire, pardon. Aujourd’hui, je vais te parler de l’une de nos plus grandes douleurs depuis ta naissance. Mais tout d’abord, je vais te laisser lire ceci. C’est le mot que j’ai écrit à Karilynn avant qu’elle ne rentre chez elle pour les fêtes de fin d’année. : Dear Kari If…


Ma chérie,
J’ai encore
tardé à t’écrire, pardon.
Aujourd’hui, je
vais te parler de l’une de nos plus grandes douleurs depuis ta naissance. Mais
tout d’abord, je vais te laisser lire ceci. C’est le mot que j’ai écrit à
Karilynn avant qu’elle ne rentre chez elle pour les fêtes de fin d’année. :
Dear Kari
If you kept your promise, you must be reading this
letter in the plane taking you back to your first country.
I’m writing ‘first’ as France really seems to have
become your second nation. I will write in English today (it’s Christmas after
all… ;)) to share with you our love.

You are
leaving us and we are feeling a bit strange. In fact, everytime your chair is
empty at the dinner table, we all look at your spot and tell each others: ‘it’s
weird when Kari is not here’. So 2 weeks without you will be difficult to bear!
You have
become a part of our family. All our friends, our relatives, colleagues ask how
you are doing as much as they do about Mathilde. And we are happy to answer
them as it seems so natural to us.
Thank you for
being who you are and for bringing joy to the 3 of us. Mathilde is in love with
you and Fred and I are so glad you came. You help us out and, more important,
make us be a happier family.
Of course, we
are afraid of you not coming back after your Christmas break. I guess all the
families probably fear this. But my heart tells me you will be there to live
the fulliest of the new coming year in France.
You are a
wonderful girl, Kari, with a big heart. You are giving your best, fighting for
your French to improve and we can see that. Don’t forget to relax: we don’t
need you to be perfect. We need you because you are who you are. Okay?
I don’t know
what the coming months are preparing for all of us. We might argue, we might
disagree, we might… Well, I can’t see through the fog covering our future
together. But I’m sure our shared love and respect would solve any problem. You
have your home in our hearts and will always be part of our band.
Enjoy every
single second of your trip. And promise to share all of it with us when you get
home!
Merry
Christmas, dear Kari. And thank you so much for being with us.
Love
Calie, Indy,
Mathilde, Fred and Julien
A peine 5 mois
plus tard, Kari claquait la porte de la maison en nous faisant tous souffrir
horriblement. Je ne sais pas si tu te souviens du chagrin que tu as dû
surmonter, à l’heure où tu me lis. Mais cela a été terrible. Tes seuls moments
de détresse aussi forts ont été les séparations avec Maman. Mais, au fil des
années, tu as appris à les gérer, à les contrôler, à les comprendre… Là, tu n’as
pas su et c’est bien normal. Aujourd’hui, tu as 10 ans et je ne peux pas t’expliquer
les raisons et les conséquences de ce départ violent et soudain. Mais j’ai
besoin de le faire pour t’expliquer, maintenant que tu es adulte et que tu me
lis. Cette lettre que j’ai écrite à Kari était pleine d’espoir, mais ne
reflétait pas la réalité (je le vois avec du recul). J’ai voulu que ça marche,
papa Fred aussi. Mais Kari n’a pas réussi. Elle a échoué à être heureuse en France
et chez nous. Et au lieu d’avoir l’honnêteté de nous le dire très rapidement,
elle a continué à faire semblant et lentement, très lentement, a blessé notre
famille.
Je te l’écrivais
plus tôt : Kari a été malheureuse pendant des mois. Nous avons tout fait
pour lui rendre le sourire, mais rien n’y faisait. Notre amour (car oui, nous
avons tous mis nos cœurs sur la table) n’a pas été suffisant. J’y ai cru. J’ai
cru qu’en l’aimant assez fort, elle se sentirait heureuse et ferait partie de
la famille. J’ai cru qu’à force d’être là pour elle, présents, compréhensifs,
elle parviendrait à être elle-même chez nous. Mais non. Il a suffi de la voir
avec sa famille et ses amies pour se rendre compte que nous ne vivions pas avec
la vraie Kari, mais avec une image. Avec ses proches, elle pétillait, parlait
tout le temps, riait… Une fois ses proches partis, elle était silencieuse,
invisible, triste.
Nous avons
commis des erreurs, c’est sûr. Mais la plus grande aura sans aucun doute d’y
avoir cru. On ne peut pas forcer quelqu’un à nous aimer. On ne peut pas se
convaincre non plus que tout ira bien, que ce n’est qu’une passade. On a essayé
de croire à une fin heureuse, à une révélation de la part de Kari… Et nous
avons été traités comme des monstres.
Papa Fred a été
énormément malheureux. Quant à moi, la blessure est bien ouverte et je suis
fragile depuis des mois. Mais le pire aura été toi, évidemment. Toi qui n’avais
rien vu venir. Toi qui as jeté toutes tes forces, qui as donné tout ton amour à
Kari… Et elle qui a pris 15 minutes pour te dire adieu. Cela a été pour toi,
alors que tu avais seulement 9 ans, d’une violence incroyable.
Et je m’en veux
beaucoup. Je ne t’ai pas assez protégée. J’aurais dû avoir le courage de
regarder les choses en face et dire à Kari de partir beaucoup plus tôt car elle
était trop malheureuse. Cela lui aurait permis, peut-être, de partir
sereinement et de te dire au revoir comme il le fallait. Je ne sais pas. Je
suis perdu. Ou, tout du moins, je l’étais.
Depuis son
départ, nous avons découvert pas mal de choses sur Kari. La douce jeune fille
timide, fragile, n’était décidément pas celle qui a vécu avec nous. Shanti
(dont je te parlerai une autre fois) en a fait les frais ainsi que d’autres
personnes. Kari a beaucoup menti pendant sa vie chez nous. Nous nous en rendons
compte avec beaucoup de retard, mais nous avons été dupés. Et je suis navré de
ne pas l’avoir vu plus tôt pour te préserver.
C’est difficile de
décrire tout ce qui a pu se passer. Cela me prendrait des heures. Je veux
seulement que tu aies confiance en nous. Nous n’avons jamais voulu un départ si
violent. Nous n’avons jamais voulu en arriver là. Nous n’avons jamais voulu que
tu souffres. Nous n’avons jamais pensé souffrir autant non plus. Nous n’avons
jamais cru qu’une personne à qui nous avions ouvert notre maison et nos cœurs,
pourrait se jouer de nous comme ça et nous traiter comme de la m…
Je suis à peu
près persuadé qu’elle est revenue dans ta vie. Par la porte ou par la fenêtre,
elle va essayer de te retrouver. Et tu en seras, sans aucun doute, ravie. Je ne
le serai pas, j’en suis sûr. Car je sais le talent de cette jeune fille pour
ternir, abîmer, faire mal, convaincre… J’ai peur qu’elle te blesse. Très peur.
Car tu arriveras avec tout ton amour, sans te protéger, sans avoir peur d’elle.
Méfie-toi, Mathilde. Reste sur tes gardes. Cette jeune fille a blessé beaucoup
de gens en l’espace de quelques mois. Elle va peut-être mûrir et changer. Je le
lui souhaite. Mais sache qu’elle ne sera pas la bienvenue dans ma vie. Elle t’a
trop fait souffrir. Elle nous a trop fait souffrir et aura mis notre famille en
danger.
Je n’arrive pas
à trouver mes mots aujourd’hui. Cette blessure est encore si fraîche. Elle
laissera des traces indélébiles. Je vis tout ceci comme un échec. Je me sens
responsable. Je voudrais tout recommencer à zéro pour ne pas te faire subir
tout ça. Mais je ne peux pas. Nous devons apprendre à vivre avec cette douleur,
lancinante, pesante, culpabilisante. Je vois que cela t’a changée, que tu n’es
plus tout à fait la petite fille que tu étais. Tu restes formidable, mais tu t’impliques
moins envers les autres. Tu te protèges davantage alors que ce n’est pas dans
ta nature. Et je trouve ça moche. Moche de te voir barricader ton cœur « au
cas où ». Cela te servira plus tard, c’est certain, mais n’oublie pas d’aimer
pleinement. Oui, nous en avons tous bavé, mais nous avons aimé. Et avons été
nous-mêmes aussi. Nous n’avons, tout simplement, pas ouvert nos cœurs et la
porte de notre maison à la bonne personne, à une personne digne de toi. Et j’en
suis désolé.
Je vais te
laisser pour aujourd’hui après ce message difficile. Le prochain sera plus
joyeux car il concernera Shanti. Shanti qui est notre médicament, qui nous
montre que nous ne sommes pas des monstres et nous aime tels que nous sommes.
Je t’aime.


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